Un peu d'histoire

b. Les guerres de religion.

Pendant les Guerres de religion, la famille de Charles d’Albignac, coseigneur d’Arre et d'Arrigas, embrasse la Réforme, ainsi qu'une partie de la population.

Mais, très vite, par fidélité au roi, d'Albignac change de camp. En 1625, lorsque le duc de Rohan soulève les protestants du Languedoc, Charles d'Albignac prend fait et cause pour Louis XIII : son château du Pont d'Arre est pris par les religionnaires, ainsi que l'église fortifiée d'Arrigas qui est presque entièrement détruite.

Quelques mois plus tard, au siège de Creissels (Aveyron), Charles d'Albignac stoppe l'avance des troupes de Rohan, ce qui lui vaut d'être élevé par le roi au rang de baron d'Arre.

Après la destruction du Pont d'Arre, Charles d'Albignac s’installe à Entraygues où il teste en 1631. Son frère, Jean d’Albignac, seigneur de la Baume et d’Arrigas, auteur de la branche des d’Albignac d’Arrigas, s’installe dans le château d'Arrigas, rebâti certainement sur les fortifications d'une demeure plus ancienne, datant probablement du XIVème siècle.

Pendant la Guerre des Camisards, en 1704-1705, les hameaux de Blanquefort, Peyraube Saint-Georges et Vernes furent attaqués, pillés et partiellement incendiés par les Réformés et d’Albignac dut à plusieurs reprises mobiliser la « Compagnie bourgeoise » pour défendre la paroisse d’Arrigas des exactions dont elle était victime. Les croix des Rogations, dont celle en pierre située aujourd’hui sous les Mines en bordure de la route de Peyraube, furent brisées par les Camisards.

c. Une économie d’Ancien régime.

A partir du XVIIIe siècle, la proto-industrie de la soie se répand rapidement dans les Cévennes et Arrigas ne fait pas exception : la profession de « faiseur de bas » est souvent mentionnée dans les documents d’archives. Les mûriers sont plantés et les magnaneries construites.

       Mais c’est la culture de la terre qui, à Arrigas, continue d’occuper la majeure partie de la population, quelle que soit la période étudiée et jusqu’à un passé très récent les Arrigassains ont été des paysans avant d’être des ouvriers, les paysages caractéristiques de la Commune, avec ses pentes sculptées de terrasses en pierres sèches, en témoignent encore aujourd’hui.

En ce qui concerne les cultures pratiquées sur le territoire de la commune, nous constatons en premier lieu qu’il n’y a pas de cultures dominantes, au contraire de ce que l’on peut voir dans un certain nombre d’autres régions, les régions de « labours » et de céréales du nord, de l’est et du sud-ouest du royaume, ou les régions de vignes qui sont aussi des régions de monocultures.

En 1636, trois cultures représentent cependant plus de 40 % de la valeur des terroirs agricoles estimés dans les compoix: il s’agit des châtaigniers, qui arrivent en tête (17,2 %), de la vigne (12,3%) et des « pred ou prat », c’est-à-dire des prés de fauche ou de pâture (11,4%).

Viennent ensuite, par ordre d’importance les espaces complantés, c’est-à-dire associant le châtaignier à la vigne ou le châtaignier à la prairie (8,2%); les « horts », c’est-à-dire les espaces consacrés à la culture légumière (3,2%); les champs qui correspondent en fait aux terres labourées c’est-à-dire aux blés et diverses céréales (3%); les bois (2,5%); les jardins (1,9%); et enfin, chose difficile à imaginer aujourd’hui, les friches appelées « herm » (qui peuvent servir tout de même au pâturage des animaux) ne représentent que 1,5% des surfaces estimées.

Quelles conclusions pouvons-nous tirer de ces données ? La culture du châtaignier et l’élevage (voir l’importance des prés, des pâtures et des friches qui sont autant d’espaces de parcours) sont les deux piliers de l’économie d’Arrigas au XVIIème siècle.

Le nord-ouest de la paroisse, terre du granit, du chêne et du hêtre, est la terre d’élection de la grande propriété et des grands parcours « sur la montagne de Roquefeuil » pour l’élevage, essentiellement ovin, mais aussi pour l’élevage porcin.

En revanche le sud-ouest de la paroisse, sur le rebord du plateau karstique de Blandas, autour de Lembrusquière et du Tour, est un espace de petite propriété morcelée où domine, sur ces sols marneux, la culture traditionnelle des « bleds ».

En d’autres termes, les céréales sont inexistantes au nord-ouest de la paroisse alors qu’elles dominent au sud-ouest.

Entre les deux, la majeure partie de la paroisse, qui est aussi la partie schisteuse de la paroisse, se caractérise par un paysage cévenol traditionnel, constitué de châtaigneraies parsemées de « clèdes » ou de prés dévolus à l’élevage ovin et parsemés de « bories ». Sans oublier les arbres fruitiers et les jardins, peu développés mais visibles partout, ainsi que la vigne, les Cévennes étant sous l’Ancien Régime exportatrices d’un vin de piètre qualité. A l’image de la terre pauvre qu’ils cultivent, les paysans d’Arrigas vivent globalement dans une situation proche de la pauvreté, en tout cas, jusqu’au milieu du XXe siècle.

 


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d. Révolution et contre-révolution.

Lorsqu’éclate la Révolution française, si une portion non négligeable de la population d’Arrigas  suit l’exemple patriote et républicain de son ancien seigneur, Louis-Alexandre d’Albignac (voir sa biographie), une autre partie, surtout sur les terroirs du nord-ouest de la paroisse, suit l’exemple du curé.

En effet, la promulgation par l’Assemblée constituante, en 1791, de la Constitution civile du clergé, rapidement condamnée par le Pape, entraîne un schisme profond et durable dans l’Eglise de France et, par voie de conséquence, dans les paroisses de campagnes.

En 1791, la cure d’Arrigas était administrée par Paul-Hyacinthe Barralis, né le 26 juillet 1755, et par son vicaire Jean-Pierre Vidal, tous deux en poste depuis avril 1779. Barralis et son vicaire refusèrent de prêter le serment constitutionnel, matérialisant l’adhésion à la Constitution civile du clergé: ils devinrent ainsi ce que l’on appelait des « prêtres réfractaires », prêtres bientôt pourchassés par la jeune République.

Sur la liste officielle des émigrés, en date du 7 Floréal an III (26 avril 1795), Barralis est mentionné comme « déporté ». En vérité, il semblerait qu’il n’ait jamais quitté sa paroisse: la tradition orale a retenu qu’il avait été caché, durant plusieurs mois, par une famille du Villaret. Une fois la tranquillité revenue, il reparut d’ailleurs comme si de rien n’était.

Entre temps, comme la plupart des églises des environs, il semblerait que l’église d’Arrigas ait été transformée en temple de la « déesse Raison ». Selon Louis Clamens, les cloches auraient même été fondues pour faire des canons, renseignement plus que douteux puisque les inscriptions relevées sur l’une des cloches de l’église nous apprennent qu’elle date de 1763 et qu’elle est donc antérieure à la Révolution.

A la même époque, des bandes royalistes sèment le trouble dans la population. L’une d’elles a pour chef Antoine Barbanse de Lembrusquière, plus bandit de grand chemin que réfractaire politique. Après avoir pillé les caves d’Entraygues ou celles du Pont d’Arre et après avoir tenté de précipiter sous le vieux pont des Trois-Ponts son voisin Etienne Bayle, qui avait le malheur d’être républicain et, surtout, répartiteur des impôts, il fut finalement arrêté et fusillé en mars 1801. Selon Adrienne Durand-Tullou, le célèbre abbé Jean-Louis Solier, dit « Sans Peur », l’un des chefs de la contre-révolution en Cévennes blanches, aurait été repéré dans l’auberge d’Estelle (actuelle maison Compan) alors en bordure de la route d’Aix à Montauban.

e. Une industrialisation limitée.

     Il est à noter l'exploitation d'une mine de cuivre, zinc et plomb de 1896 à 1907 (au lieu-dit Le Teulas) mais qui avait commencé dès l'époque gallo-romaine. Actuellement on peut encore voir des traces de cette exploitation (galeries et restes de bâtiments). Mais Arrigas va rester pour l’essentiel, aux XIXe et XXe siècles, en marge de la Révolution industrielle et de l’aventure textile des Cévennes.

       Cependant, c’est l’industrie textile qui, surtout après la Seconde guerre mondiale, quand l’agriculture rejette beaucoup de bras, va faire vivre une ou deux générations d’ouvriers originaires d’Arrigas.  Les ouvriers originaires d’Arrigas vont surtout s’employer, dans deux sites industriels plus proches de notre commune: à Aumessas pour les femmes, dans l’atelier de bonneterie de la famille du Luc; dans les usines de bonneterie Brun, à Arre, pour les hommes.

C’est dans les années 1880 que l’aventure industrielle de la famille Brun prend un essor capital. Antoine Brun impose alors le recours aux métiers mécaniques pour la bonneterie de soie (et supprime ainsi le recours à l’industrie domestique) et introduit les premiers métiers à grand rendement, conçus par William Cotton, pour ce qui est des bas et autres articles chaussants en coton ou en fil.

Cette évolution se trouve renforcée par la création, en 1906, de la première marque au monde de « bas fantaisie »: le célèbre « bas lys » qui, outre la notoriété mondiale qu’il fait acquérir à l’industrie bonnetière cévenole, transforme la famille Brun du statut de simples petits entrepreneurs locaux en l’une des plus grandes familles du patronat industriel français.

En 1924, la seule usine d’Arre emploie 600 ouvriers, auxquels il faut rajouter des effectifs similaires dans les deux autres usines Bruns existant à cette époque, l’une à Saint-Jean-de-Bruel et l’autre à Avèze, dans les faubourgs du Vigan.

En relation avec l’aventure industrielle des Brun d’Arre, la création à Peyraube, en 1899, d’un aérium départemental. Mais, faut-il dire le sanatorium, l’aérium ou la crèche départementale ? Le projet, porté par Antoine-Louis Brun, alors Conseiller général du canton d’Alzon, consiste en la création d’un sanatorium pour les enfants pauvres des départements méditerranéens, soumis à une évolution dentaire entre juillet et septembre sous climat méditerranéen et qui développent des diarrhées persistantes qui leurs sont souvent fatales, le manque d’hygiène caractéristique des classes populaires à cette époque aggravant encore la situation.

Mais l’établissement qui ouvre ses portes en 1899, suite au rapport défavorable d’un inspecteur du ministère de la santé, ne sera qu’un aérium ou crèche départementale, n’accueillant des enfants que l’été, et ce jusqu’en 1939.

Pendant la guerre, de 1939 à 1940, une section du Génie s’y installa avec des mulets, relayée en 1941 par les Chantiers de Jeunesse puis, à l’automne 1943, par un Orphelinat religieux ayant été bombardé. En 1946, les religieuses ayant retrouvé un établissement, qui convenait mieux à leurs besoins, repartirent s’installer à Sommières.

Le Département souhaitant voir fonctionner cet établissement à longueur d’année passa alors une Convention avec le COSOR (Comité des Œuvres Sociales des Organismes de la Résistance). C’est sous cette appellation d’ailleurs que l’aérium de Peyraube est encore aujourd’hui connu en Pays viganais. C’est ainsi que des enfants de fusillés et de déportés, recrutés par les différents COSOR départementaux,arrivèrent de tous les coins de France à Peyraube. Certains ne restèrent que quelques mois et repartirent dans leurs familles (oncles ou tantes rescapés des camps mais ayant repris une vie active), mais ceux qui n’avaient plus rien restèrent plusieurs années à Arrigas. En 1972, le site se reconvertit en MCSS (Maison à Caractère Sanitaire Spécialisé), fermée en 2002 car jugé trop éloignée des centres urbains. Mais pendant un siècle, l’aérium de Peyraube fut une providence pour tous les habitants de la commune d’Arrigas qui y furent embauchés, obtenant ainsi une certaine aisance, loin de la misère où le travail de la terre les avait maintenus pendant des siècles.

     Car, jusqu’aux années 1970, Arrigas demeure fondamentalement un terroir agricole. Tout d’abord en relation avec l’élevage, ovin et caprin. En ce qui concerne la vocation laitière, il faut rappeler l’importance du développement du Roquefort « société », en Aveyron voisin, et vers lequel convergent durant toute la première moitié du XXème siècle, le lait des plus grands troupeaux ovins d’Arrigas.

Jusque à la fin des années cinquante, des représentants de Roquefort passent chez les éleveurs collecter le produit de leur traite: c’était le temps des 2000 brebis sur le territoire de la commune d’Arrigas !

A partir de la fin des années cinquante, Roquefort réduit ses collectes. Surtout, les éleveurs vieillissent et le troupeau n’est plus repris par des héritiers plus attirés par le confort urbain que par un mode de vie traditionnel qui reste malgré tout d’une très grande pénibilité.

Avec les années soixante et soixante-dix, dans la lignée de Mai 68 et du « retour à la terre », un certain nombre de jeunes éleveurs, plutôt caprins qu’ovins, reviennent s’installer à Arrigas avec pour objectif de relancer l’élevage traditionnel, soit pour produire le fameux « pélardon » des Cévennes, soit pour produire des agneaux de boucherie.

Nombreux sont ceux qui échouent, par manque de moyens d’investissement ou par manque de marchés ou bien, plus fréquemment, par rejet d’un mode de vie que l’on avait idéalisé et que l’on découvre infernal.

En ce qui concerne les cultures fruitières ou fourragères, l’évolution est un peu la même. Les cultures fruitières et fourragères ont elles aussi connu leur apogée, approximativement, entre 1896 et 1957. A ce moment-là, la plupart des agriculteurs d’Arrigas produisent et commercialisent des pommes (« reinette » ou « golden »), des prunes (« reine Claude »), des cerises plus tardivement et plus brièvement pour cause de perturbation des climats.

Mais là aussi, la culture fruitière demandait beaucoup de travail, toujours soumis aux caprices de la météo, pour un revenu bien modeste.Aussi, depuis quarante ans,l’évolution la plus visible dans le paysage, c’est la progression rapide et spectaculaire, d’une friche généralisée qui dévore d’années en années les terres autrefois dévolues aux fourrages, aux vergers, à la vigne, aux jardins.

 

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